ALGER – L’homme politique et ancien ministre Mohamed Seddik Benyahia, décédé dans un accident d’avion le 3 mai 1982, incarnait l’homme d’Etat dévoué et le diplomate infatigable qui a fait connaitre la Guerre de libération dans le monde et servi le pays avec abnégation et humilité après l’indépendance.

Né le 30 janvier 1932 à Jijel, Mohamed Seddik Benyahia, cet “homme hors normes”, comme le qualifiait son compagnon de lutte, Rédha Malek, et au parcours irréprochable, avait marqué par son courage et son sens du sacrifice l’histoire du mouvement national et celle de l’Algérie combattante et indépendante.

Le jeune militant qui a côtoyé plusieurs personnalités à l’image de Belaid Abdesselam et Lamine Khene, au lycée Albertini à Sétif, faisait déjà ses preuves en étant un membre actif et animateur de l’Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA) et est l’un des partisans de 19 Mai 1956 qui a vu des centaines d’étudiants et de lycéens abandonner les amphis et les salles de classes pour rejoindre la Révolution.

Diplômé en droit en 1954 de l’université d’Alger, le jeune Benyahia s’est fait remarquer sur la scène politique et s’est vu même confier d’importantes missions à l’étranger, à l’instar de la conférence de Bandung en 1955 à laquelle l’Algérie, qui était en guerre contre le colonialisme, avait pris part en tant que pays observateur. Benyahia, alors âgé de 23 ans, faisait partie de la délégation algérienne présidée par Ait Ahmed et M’hamed Yazid.

Après la création de l’UGEMA, les autorités coloniales avaient lancé un mandat d’arrêt contre Benyahia et Lakhdar Ibrahimi, qui se trouvaient à l’époque à Jakarta. Pour assurer leur protection, les dirigeants du FLN avaient décidé de les affecter au bureau local du FLN en Indonésie.

Le jeune militant a vite imposé son charisme et gravi les échelons dans la hiérarchie de la glorieuse Armée de libération nationale (ALN) en devenant le secrétaire général de la présidence du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), et membre de la délégation algérienne aux négociations des Accords d`Evian en 1962. Il avait également représenté, aux côtés de Rédha Malek, le GPRA lors d’une rencontre de négociations le 28 octobre 1961 à Bâle, en Suisse.

Ses compagnons de lutte, dont les témoignages ont été recueillis lors de différentes commémorations de sa disparition, n’avaient cessé de brosser le profil d’un grand militant nationaliste et d’un diplomate au talent avéré et dont la mort était une grande perte pour l’Algérie.

L’ancien Chef de Gouvernement et ami de lutte de Mohamed Seddik Benyahia durant la Guerre de libération nationale, lors d’une journée d’étude organisée en 2017 à l’université de Jijel, évoquait un homme “hors norme ” qui a marqué de son emprunte les négociations d’Evian.

Rédha Malek qui relatait le parcours révolutionnaire et diplomatique du militant nationaliste, affirmait que ses réalisations avaient “contribué au développement de l’histoire de l’Algérie contemporaine”.

Il avait également mis en avant le rôle de Benyahia dans les négociations d’Evian, soulignant “ses compétences tactiques” et “son intelligence diplomatique” durant les négociations entre le Front de libération nationale (FLN) et la délégation française.

Lors d’une cérémonie commémorant le 34e anniversaire de la disparition de Mohamed Seddik Benyahia, feu Zoheir Ihadadène avait évoqué les qualités d’un homme “nationaliste, intègre et compétent “, ajoutant qu’il était aussi un “fin politicien, doublé d’un diplomate et juriste aux talents avérés”.

A l’indépendance, le moudjahid avait assumé plusieurs postes d’ambassadeur et de ministre, notamment ministre de la culture, de l’enseignement supérieur, ministre de l’information et celui des affaires étrangères.

Désigné à la tête de la diplomatie algérienne en 1979, Mohamed Seddik Benyahia était au service de la paix dans le monde. L’historie retient encore aujourd’hui, 39 ans après sa disparition dans un tragique accident d’avion, son rôle dans le dénouement de la crise des 52 américains retenus otages pendant 444 jours au siège de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran, en amenant les deux parties à signer l’accord d’Alger le 19 janvier 1981.

Le ministre des Affaire étrangères poursuivait sa mission de paix et s’était engagé, quelques mois après l’affaire des otages américains, dans le bourbier irako-iranien voulant à tout prix mettre un terme à une longue guerre dévastatrice. Après avoir échappé à la mort dans un crash d’avion en 1979 au Mali, il trouvera la faucheuse, avec 13 autres cadres du ministère, le 3 mai 1982, dans un autre crash de l’avion qui le transportait en direction de l’Iran où il était en mission de médiation dans le conflit frontalier entre Téhéran et Baghdad.

Dans une lettre adressé au Martyr Benyahia, publiée au lendemain de son enterrement dans le quotidien El Moudjahid, l’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Salah Dembri, rendait hommage à un homme d’une “conscience aigue de l’injustice et cette foi nationaliste profonde qu’il sut toujours offrir aux influences harmonieuses et salutaires du devenir universel, sans jamais l’enfermer dans une crispation stérilisante, ni dans un quelconque rabougrissement desséchant”.

“Il aimait à rappeler que l’indépendance n’est pas une fin en soi, mais qu’elle devait, dans cette conjonction du passé et du présent, favoriser le transfert indispensable de la Nation à la société et l’émergence de citoyens nouveaux, d’Algériens totalement libres et totalement libérés”, poursuivait feu Dembri, dans sa dernière lettre à Benyahia.

“APS”

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